Intéressement, rémunération variable… : de la théorie à la pratique, encore du chemin à parcourir
Par Alban Garel | Le | Salaires
La Première ministre Élisabeth Borne le rappelait encore lors de la présentation de sa feuille de route le 26 avril 2023 : « Il faut encourager une distribution plus juste des richesses produites par les entreprises et réfléchir collectivement à une revalorisation des salaires ».
Le gouvernement prépare d’ailleurs une « transposition fidèle » de l’accord national interprofessionnel conclu le 10 février 2023 entre les organisations patronales et syndicales sur le partage de la valeur.
Dans ce contexte, une étude publiée par le cabinet spécialisé en rémunération variable Primeum en partenariat avec l’Ifop révèle une prise de conscience liée aux dispositifs de partage de la valeur chez les dirigeants et les salariés. Un constat qui se heurte à une réalité moins favorable : l’intéressement comme la rémunération variable demeurent encore peu déployés, trop cantonnés aux plus hauts postes, et rencontrent un accueil mitigé dans l’opinion publique.
Partage de la valeur : des dispositifs encore peu accessibles aux salariés
- Seuls 45 % des actifs déclarent être concernés par une rémunération annexe qu’il s’agisse de primes d’intéressement, de rémunération variable indexée aux performances, d’avantages en nature ou encore de stock-options/actions gratuites ;
- Les dispositifs d’intéressement sont les plus accessibles aux actifs mais sont encore très loin d’être généralisés puisque seuls 32 % d’entre eux et 47 % des dirigeants y ont accès.
Les Français ambivalents vis-à-vis du dividende salarié et de la rémunération variable
- Plus de sept actifs sur dix estiment que la rémunération variable, sous forme d’intéressement, permet certes un meilleur partage de la richesse générée par l’entreprise (74 %), mais fragilise en parallèle le pouvoir d’achat des salariés en le mettant à la merci de la conjoncture économique de leur entreprise (76 %) ;
- De plus, l’écrasante majorité des actifs considère qu’elle permet de renforcer la motivation des salariés concernés (73 %) et d’augmenter la performance globale de l’entreprise (70 %), mais qu’en miroir, les salariés sont incités à entrer en compétition les uns avec les autres (72 %) et subissent davantage de pression et de stress (68 %) ;
- Un constat qui est sans appel pour les chefs d’entreprise et DRH qui la déploient puisqu’ils identifient assez nettement trois atouts principaux de la rémunération variable :
- le renforcement de la motivation des salariés (91 %),
- un meilleur partage de la valeur ajoutée (87 %) ;
- une meilleure performance globale de l’entreprise (80 %).
- De même que les actifs directement concernés par la rémunération variable, signe que cette dernière peut effrayer en théorie mais est grandement appréciée dans la pratique : ceux ayant une part de rémunération variable sont quasiment systématiquement plus positifs que l’ensemble du grand public concernant différents aspects de celle-ci, que ce soit à travers une meilleure redistribution de la valeur ajoutée (86 %), une plus forte motivation des salariés (88 %), une meilleure performance de l’entreprise (82 %) ou bien une meilleure compensation de l’inflation (69 %).
Rémunération variable : l’essayer c’est l’adopter
En résumé les dirigeants qui déploient ces dispositifs, de même que les actifs touchant une part de rémunération variable, sont les plus convaincus par ce mode de rémunération, preuve en est que l’essayer c’est l’adopter.
La rémunération variable, une pratique encore très circonscrite à une poignée de salariés
- Moins d’un actif français sur quatre (23 %) se dit concerné par la rémunération variable et un peu moins du tiers des dirigeants (30 %) dont les salariés sont concernés par la rémunération variable déclarent la pratiquer auprès de l’ensemble d’entre eux ;
- Cette distribution dépend surtout, chez les actifs comme chez les dirigeants, de la taille d’entreprise. Ainsi, plus les entreprises sont grandes, plus elles pratiquent la rémunération variable. De même, les entreprises ayant un chiffre d’affaires annuel de minimum 50 millions d’euros pratiquent bien plus la rémunération variable que celles dont le CA est inférieur à moins de 2 millions d’euros ;
- Par ailleurs, la rémunération variable demeure pour le moment l’apanage de certaines fonctions, parmi lesquelles les fonctions commerciales (44 %) et dirigeantes (37 %) sont prépondérantes. Les fonctions de production ainsi que les fonctions support ou administratives demeurent encore en retrait sur ce point. La situation diffère également selon le profil des interviewés. Majoritairement, ce sont les cadres qui sont concernés (47 %), généralement hommes (30 %) âgés de 18 à 24 ans (28 %) salariés du secteur privé (26 %) ;
- Au global, selon les dirigeants, la rémunération variable de l’ensemble des collaborateurs représente, seulement 13 % de la masse salariale.