CPF : le reste à charge de 100 euros est entré en vigueur le 2 mai 2024
Par Valerie Grasset-Morel | Le | Dispositifs
Le ticket modérateur de 100 euros applicable à la majorité des Français qui utilisent leur CPF pour financer une formation est entré en vigueur le 2 mai 2024. Voici les contours du nouveau dispositif.
100 euros, c’est ce que doivent désormais débourser les personnes qui financent une formation avec leur Compte personnel de formation ou CPF.
Le décret mettant en œuvre ce ticket modérateur ou reste à charge instauré par la loi de finances pour 2023 a été publié au Journal officiel le 30 avril 2024 et s’applique depuis le 2 mai.
Ce montant forfaitaire sera revalorisé chaque année en fonction de l’évolution des prix à la consommation.
Exonérations
Certaines personnes en sont cependant exonérées :
- Les demandeurs d’emploi ;
- Les salariés dont la formation fait l’objet d’un abondement de leur employeur, y compris lorsque cet abondement est versé en application d’un accord collectif (abondements de branche notamment) ;
- Les salariés qui mobilisent tout ou partie des points inscrits sur leur C2P (compte professionnel de prévention) pour se reconvertir ;
- Les salariés victimes d’une incapacité permanente égale ou supérieure à 10 %, ou victimes de maladie professionnelle ou d’accident du travail qui font usage de leur abondement.
Participation automatiquement prise en compte dans le coût de la formation
Cette participation est automatiquement prise en compte dans le coût de la formation, lorsque les titulaires du CPF achètent en ligne leur action de formation sur la plateforme Mon Compte Formation.
- « Ce montant est à régler au moment de l’inscription par carte bancaire ou virement.
- L’absence de règlement de cette somme ne permettra pas de valider l’inscription à la formation ; aucun délai ou facilité de paiement ne seront accordés », précise la Caisse des Dépôts sur Mon Compte Formation.
Modalités d’utilisation du reste à charge ou ticket modérateur de 100 € (ministère du Travail)
• Lorsque le salarié a suffisamment de droits sur son CPF pour prendre en charge la totalité de la dépense de formation : avec, par exemple, 2 000 € de droits CPF pour une formation de 1 500 €, le titulaire verra les droits CPF de son compte déduits de 1 400 € et il s’acquittera d’un paiement de 100 € sur le site Mon Compte Formation. Il lui restera 600 € de droits CPF.
• Lorsque le titulaire du CPF n’a pas suffisamment de droits sur son compte : avec, par exemple, 2 000 € de solde CPF pour une formation de 2 500€, la participation obligatoire est déjà intégrée dans le reste à charge qu’il doit régler pour pouvoir souscrire à la formation (dès lors que le reste à charge est égal ou supérieur au montant de la participation obligatoire). Le titulaire paye 500 €.
• Lorsque le reste à charge du titulaire est inférieur au montant de la participation obligatoire : alors ce dernier devra également s’acquitter de la différence. Par exemple, avec 2 450 € de solde CPF pour une formation de 2 500 €, le reste à charge à payer par le titulaire est de 50 €, auquel il sera ajouté 50 € pour arriver au montant de la participation obligatoire.
Source : ministère du Travail
Une prise en charge possible par l’employeur et l’Opco
Le décret prévoit que l’employeur et l’Opco peuvent prendre en charge ce ticket modérateur. Le titulaire du compte doit demander un remboursement des 100 euros une fois qu’il a payé cette somme sur Mon Compte Formation lors de sa souscription.
De leur côté, les dirigeants de Lingueo, un organisme de formation et de certification, envisagent de créer un fonds de soutien destiné aux actifs non exonérés du reste à charge.
« Le rôle d’un organisme de formation est de favoriser l’éducation et la montée en compétences des personnes. Il nous semble donc normal de réfléchir à une solution pouvant aider celles qui seront pénalisées », déclarent les cofondateurs de Lingueo, Guillaume le Dieu de Ville et Arnaud Portanelli.
L’accès à ce fonds serait conditionné à la réalisation complète de la formation (pas seulement linguistique) et à la réussite de la certification. Les ressources viendront de certificateurs, d’organismes de formation, d’entreprises ou de fédérations volontaires pour cotiser à ce fonds.
La CDC précise cependant sur son site qu'« aucune autre personne - hormis l’employeur et l’Opco - ne peut prendre en charge cette somme ».
Un dispositif critiqué
Le reste à charge CPF, créé en 2023, a tardé à être mis en œuvre en raison des critiques exprimées par de nombreux acteurs et observateurs, et pas uniquement des organismes de formation. Les organisations syndicales sont les premières à tacler l’exécutif qu’elles accusent de pénaliser les actifs les plus précaires.
Selon Aline Mougenot, cheffe de file sur la formation professionnelle à la CFTC, « les personnes qui seront les plus affectées sont les moins qualifiées (sans diplôme ou de niveau infra bac) ». Elle aurait préféré que le curseur soit mis sur le niveau de qualification du titulaire du CPF.
« Ce reste à charge va surtout toucher les personnes à faibles revenus, alors que l’État comptait sur ce dispositif pour décourager les utilisateurs du CPF qui n’en n’avaient pas un réel besoin. Il faudrait plutôt chercher à savoir si le CPF est utile pour le parcours professionnel d’une personne, avant de vouloir faire des économies », dit de son côté Jean-François Foucard, secrétaire national de la CFE-CGC en charge de l’emploi et de la formation professionnelle.
Contre-propositions
La fédération Les Acteurs de la Compétence, l’une des organisations d’employeurs représentatives des organismes de formation, avaient fait 2 contre-propositions au reste à charge :
- rendre plus faciles les abondements CPF,
- extraire le permis moto A2 du financement par le CPF qui a été autorisé par le Gouvernement en janvier 2024.
Depuis l’éligibilité du permis moto au CPF, les demandes ont explosé. Fin février, la CDC enregistrait une consommation du permis moto de près 57 millions d’euros (principalement la catégorie A2, les motos les plus puissantes), ce qui atteignait presque la consommation relevée sur le permis voiture à cette période (70 millions d’euros). En année pleine, la consommation prévisionnelle des nouveaux permis éligibles était estimée entre 274 millions d’euros et 337 millions d’euros.
Coup de frein sur le financement du permis de conduire
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé d’encadrer le recours au permis de conduire en général et au permis moto en particulier dans le cadre du CPF.
Un projet de décret sera publié prochainement dans ce sens.
- L’utilisation du CPF ne sera possible que pour financer la préparation d’un premier permis de conduire du groupe léger uniquement.
- Le titulaire du compte ne devra pas disposer d’un permis de conduire en cours de validité sur le territoire national et ne pas faire l’objet d’une suspension de permis ou d’une interdiction de solliciter un permis de conduire.