Allemagne : la loi sur les lanceurs d’alerte adoptée
Par Agnès Redon | Le | International
En Allemagne, la loi sur les lanceurs d’alerte a été adoptée le 12 mai 2023 et entrera en vigueur à la mi-juin 2023, conformément à la directive européenne UE 2019/1937.
Les obligations des entreprises
- Pour les entreprises de moins de 250 salariés, la loi prévoit un délai de mise en œuvre jusqu’au 17 décembre 2023.
- Pour les entreprises de plus de 249 salariés, la loi s’appliquera à la mi-juin 2023.
Dans le détail, la loi prévoit :
- Un renversement de la charge de la preuve en faveur des lanceurs d’alerte. Concrètement, cela signifie qu’en cas de litige, l’employeur doit prouver que les mesures prises à l’encontre des lanceurs d’alerte, telles qu’un avertissement, une mutation ou un licenciement, ne sont pas des représailles
- La protection concerne toute personne physique (collègues, proches) ou morale, comme un syndicat notamment, qui aide le lanceur d’alerte à effectuer le signalement ;
- L’employeur doit s’assurer que les personnes désignées pour recevoir un signalement interne sont en mesure d’exercer leurs fonctions en toute indépendance et identifier des conflits d’intérêts potentiels ;
- Quand une entreprise reçoit un signalement via son système d’alerte interne, elle doit confirmer la réception du signalement dans les sept jours. Après trois mois supplémentaires, l’entreprise doit un retour au lanceur d’alerte sur les actions prévues et déjà mises en œuvres.
- En cas de violation de la loi, les entreprises s’exposent à une amende pouvant aller jusqu’à 50 000 euros.
Une loi votée après plusieurs tentatives
Cette loi est le fruit d’un accord de la Commission de conciliation parlementaire entre le Bundesrat (Länder) et le Bundestag (députés), après un retard de presque un an et demi. En effet, une saisine de la Cour de justice par la Commission européenne avait été adressée à l’Allemagne pour défaut de transposition de la directive UE 2019/1937.
En juillet 2022, la Commission européenne avait engagé des procédures d’infraction contre 15 États membres, demandant officiellement de se conformer au droit européen. Une deuxième demande avait ensuite été envoyée en septembre 2022 à quatre États membres, dont l’Allemagne faisait partie, pour ne pas avoir communiqué le plan d’action pour transposer la directive.
En février 2023, la Commission européenne avait ainsi décidé de les déférer devant la Cour européenne de justice pour défaut de transposition et de notification des mesures nationales de transposition de la directive sur les lanceurs d’alerte.
Les arguments avancés au Parlement fédéral (Bundesrat) contre le projet de loi consistaient à dire que la loi ferait peser une charge excessive sur les petites et moyennes entreprises.
La situation en France
En France, plusieurs textes protègent les lanceurs d’alerte. Le principal est la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi Sapin II.
Cette loi a été sensiblement modifiée par la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte, laquelle assouplit la définition du lanceur d’alerte et renforce les protections accordées à ce dernier.
Comme en Allemagne, la loi interdit à toute personne de prendre à votre encontre des décisions défavorables en lien avec l’alerte.
La responsabilité des auteurs de discriminations à l’égard des lanceurs d’alerte est pénale (article 225-1 du Code pénal).